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Le blog du passé

Métiers, salaires, conditions de vie , vêtements, alimentation etc. au cours de ce passé riche de découvertes ! Top 1 des mes articles lus : le certificat d'études, l'école, les bébés Top 2 les logements et salaires Top 3 les métiers N'hésitez pas à me laisser des commentaires, je répondrais avec joie

Ouvrier gantier en Isère près de Grenoble avant 1870

Les maitres gantiers de Grenoble faisaient appel aux ouvriers gantiers ( 2 ans d’apprentissage)
Histoire de Théodore G. né vers 1838 et vivant sur la commune de Biviers en Isère 

Le début de sa vie 
Son travail d'ouvrier gantier 
Son salaire
Le travail de sa femme
Les repas de ce couple

 

Le début de sa vie 

Théodore G. appartient à une famille aisée d'agriculteurs. Son père a tenu longtemps une ferme importante.
il a pris part jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans aux travaux de l'agriculture, a servi dans l'artillerie et a fait sous les murs de Sébastopol le service de la tranchée pendant une année,
après laquelle son père l'a racheté ?? et rappelé auprès de lui. Il avait contracté en Orient le typhus et le scorbut ; mais son retour en France l'a promptement rétabli. 
il avait senti de tout temps un certain attrait, tant à cause de la facilité du travail et des relations avec la ville, qu'à cause de l'élévation des salaires.

Travail de l'ouvrier gantier :

 L'ouvrier travaille à la tâche comme tailleur coupeur de gants. Cette profession, qui est celle des gantiers proprement dits, est assurément aussi la plus importante et la plus délicate. Elle consiste à donner à la peau la qualité et du nombre des gants qu'on doit en tirer suivant la commande du patron, qui livre à l'ouvrier une certaine quantité de peaux représentant un nombre déterminé de paires de gants. L'ouvrier gantier tire la peau dans le sens le plus favorable et enlève les parties rugueuses ou trop épaisses. Il cherche à en dissimuler les défauts ou plutôt à les faire coïncider avec l'ouverture des doigts.
Enfin il taille à l'aide de ciseaux sur des formes en carton la main ébauchée du gant. (Test de ce travail préparatoire, de cette forme rudimentaire et qui semble à peine indiquée, que dépend le mérite véritable et réel du gant. La main de fer qui viendra ensuite tailler mécaniquement l'œuvre ébauchée par le gantier ne saurait faire disparaître les défauts de la peau, ni changer le mauvais sens qui lui aurait été donnée primitivement. La tâche du gantier coupeur consiste donc à savoir tirer un parti avantageux des peaux qui lui sont confiées, de manière non seulement à ce que le gant en fasse ressortir les perfections et disparaître les défauts, mais de manière aussi à ce qu'aucune parcelle de la matière première ne soit perdue pour la fabrication. Les patrons fixent eux-mêmes à chaque ouvrier la quantité de gants qu'ils doivent rapporter pour le nombre de peaux données. 


Son salaire 

Le prix de ce travail est à peu près le même pour tous les gantiers ; il se paye généralement 3 francs par douzaine de gants taillés. Théodore en fait 16 environ, ce qui porte sa journée moyenne à 4 francs, et c'est aussi la journée moyenne de la plupart des gantiers ; mais il n'est pas difficile de dépasser ce chiffre en forçant les heures de travail, d'arriver ainsi à faire 2 douzaines de paires de gants dans la journée et à gagner 6 francs. 
Outre son ouvrage habituel, Théodore va à la ville tous les huit jours ou tous les quinze jours, chercher de l'ouvrage ou porter au patron celui qu'il a terminé. A ses moments perclus il cultive son petit jardin, et rend quelques services à la ferme de ses parents,
Cette profession peut s'exercer en tout temps et à toute heure du jour ; le soir à la veillée, au milieu des réunions et des conversations des voisins, 
L'ouvrier ne reçoit aucune subvention de son patron ; cependant il est d’usage parmi les fabricants de gants de Grenoble de donner quelquefois au jour de l'an, à ceux de leurs ouvriers auxquels ils tiennent particulièrement, une rémunération d'encouragement qui peut
s'élever de 20 à 30 francs. Théodore n’est pas encore assez ancien dans la maison où il travaille, pour avoir obtenu cette faveur

Le travail de sa femme.

 La femme de Théodore s'occupe, comme la plupart des jeunes femmes de l'Isère, de coudre et de piquer des gants ; cet ouvrage se fait à la main, au moyen d'un petit étau appelé mécanique, qui enserre le gant et règle la ligne où l'aiguille doit passer. On paye 3 francs la douzaine de paires de gants cousus ; une bonne ouvrière ne peut guère gagner plus de 1 franc par jour, c'est ce que gagne la femme de Théodore les jours où elle n'est point trop dérangée par son enfant et les soins du ménage. En dehors de ce travail et des soins qu'elle donne à sa petite fille qu'elle nourrit, elle s'occupe de l'entretien et de la confection de ses vêtements et de ceux de son mari, du blanchissage du linge, de la fabrication du pain et de la préparation des aliments.

Les repas.

L'alimentation des artisans de l'Isère est généralement très bonne.
Celle de la famille de Théodore est substantielle et abondante : habitant la campagne, cette famille profite, sans grandes dépenses, des ressources que procurent les jardins et les fermes de leurs parents, et du bon marché des denrées, qui ne subissent pas à Biviers les droits d'octroi. 

La famille fait régulièrement trois repas par jour : 
à. 8 heures du malin, le déjeuner : il se compose toujours d'une soupe aux légumes ou au laitage, d'œufs et de légumes accommodés de diverses manières ; même à ce repas et en tout temps les époux boivent du vin ;
  à midi, le dîner : un plat de viande soit bouillie, soit rôtie, soit accommodée en ragoût ; un plat de légumes accommodé en gratin au fromage, suivant une mode très répandue dans le pays ; enfin des fruits frais ou conservés, suivant la saison ; 
à 7 heures du soir, le souper : on y prend une soupe grasse ou maigre, des légumes, du fromage, des fruits, quelquefois aussi les restes du dîner.

Ils boivent 3 litres par jour à eux deux, sans compter les verres de vin qui s'offrent entre voisins à toute heure du jour et par forme de politesse, quand on va se visiter. Cette famille ne fait en cela que se conformer aux usages d'un pays où le vin n'est nullement un objet de luxe, surtout dans les campagnes, qui le récoltent en assez grande abondance et préfèrent le consommer plutôt que de le vendre à vil prix. 
Une autre observation s'applique 'à l'usage, très répandu clans le département de l'Isère, du fromage de Gruyère pour accommoder les légumes et la viande sous forme de gratin. Les époux consomment 12 kilogrammes de beurre ; en revanche ils emploient 25 kilogrammes de
fromage, qui passent presque en entier dans la cuisine. Cet assaisonnement, très répandu clans le pays, est à la fois économique et favorable à l'alimentation. A Grenoble, on voit presque à chaque heure du jour circuler dans les rues des plats tout préparés et couverts de
fromage de Gruyère râpé, qu'on porte au four banal du boulanger; moyennant une très légère redevance, on s'épargne ainsi les frais du combustible et de la préparation des aliments.

La femme de Théodore fait elle-même le pain de la maison; elle achète chez l'épicier et le cabaretier du village les quelques objets dont elle peut avoir besoin.

Tiré de ::  Les Ouvriers des deux mondes : [sous la direction de Frédéric Le Play]

disponible sur Gallica

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